Que risquent l’artisan et le client en cas de défaut d’assurance décennale ?

La construction de bâtiment est une activité jalonnée de nombreux risques. Un chantier livré peut dissimuler parfois d’importants défauts préjudiciables aussi bien pour le client que pour l’artisan plus tard. Afin de se protéger d’éventuels dommages sur 10 ans, les professionnels du BTP ont l’obligation de souscrire une assurance décennale. Que risquent artisan et client en cas de défaut d’assurance décennale ?

Quels sont les risques pour l’artisan en cas d’absence d’assurance décennale ?

La souscription d’une garantie décennale étant un impératif, il va de soi qu’en cas de défaut d’assurance, le professionnel encourt des sanctions.

Sanctions légales

Les professionnels du secteur du BTP grâce aux assurances décennales arrivent à garantir aux maîtres d’ouvrages la couverture totale d’éventuels dommages pouvant affecter la solidité ou la viabilité de l’ouvrage après livraison. Mais, il n’est pas rare de tomber sur des artisans qui ne disposent pas d’attestation d’assurance décennale. Dans le cas où la responsabilité de ces professionnels venait à être engagée dans un sinistre décennal, ces derniers s’exposent à d’importantes sanctions légales.

Un artisan non couvert peut en effet écoper d’une amende pouvant aller jusqu’à 75 000 € et d’une peine d’emprisonnement qui peut atteindre 6 mois. Les sanctions varient souvent en fonction :

  • du corps de métier : maçon, menuisier, charpentier…
  • de la nature des dégâts,
  • de l’évaluation des experts…

Toutefois, les juges appliquent la plupart du temps des sanctions relativement faibles : les amendes oscillent entre 2 000 et 5 000 € et les sanctions d’emprisonnement sont en général fermes, sans sursis. Il faut également savoir que dès lors que la responsabilité du professionnel est établie, celui-ci a l’obligation de payer les frais de procédure de la partie adverse, qui peuvent représenter une forte somme d’argent.

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La réparation du préjudice à ses frais

En plus d’être frappé par des sanctions légales, un constructeur impliqué dans des dommages avec un défaut d’assurance décennale doit prendre aussi à charge tous les frais de réparation. Les préjudices causés au client peuvent selon le cas s’élever rapidement à plusieurs dizaines de milliers d’euros. Le professionnel peut donc se retrouver facilement dans de grosses difficultés financières.

Parce que la garantie décennale est obligatoire pour toutes personnes, qu’elles soient physiques ou morales, cela implique qu’en l’absence de couverture, la responsabilité des dommages est engagée à la fois au titre de l’entreprise et du salarié. Ainsi, de nombreuses structures se retrouvent en liquidation judiciaire avec des dirigeants poursuivis mettant en danger leur patrimoine individuel.

Une mauvaise réputation

L’un des risques que court un professionnel qui ne serait pas en règle sur le plan de son assurance est de voir sa réputation sérieusement entachée. En effet, la plupart des entreprises notamment les PME et les TPE du BTP multiplient leurs portefeuilles clients par la prospection, mais aussi, par le bouche-à-oreille. Si ce dernier est positif, les professionnels enregistreront davantage de nouveaux contrats de construction. Dans le cas contraire, ils perdront en crédibilité et par conséquent se retrouveront avec de moins en moins de chantiers. Il est donc préférable pour un artisan de souscrire une couverture décennale, car un scandale de condamnation pour défaut d’assurance affecterait la confiance des prospects.

Que risque le client en cas de défaut d’assurance décennale ?

Si un client se fait construire sa maison par un artisan sans prendre le soin de lui réclamer une attestation d’assurance décennale, ce dernier s’expose à de gros risques. En effet, en l’absence de garantie décennale, un maître d’ouvrage court le risque de n’être pas indemnisé des dommages et de se voir opposer l’insolvabilité des professionnels qui ont bâti son ouvrage.

Si de surcroît le client ne dispose pas d’un contrat d’assurance dommages-ouvrage, il y a très peu de chances pour que les préjudices dont il est victime soient pris en charge. Il faudra peut-être faire appel à un avocat pour savoir si dans cette situation, il est utile d’engager une poursuite judiciaire ou non. Dans l’éventualité où la victime a souscrit une garantie protection juridique dans l’un de ses contrats d’assurance, ce sera certainement l’occasion de la faire jouer.

Par ailleurs, il est important de rappeler que l’assurance décennale est reliée au bien et pas au nom du propriétaire. Cela signifie que si le propriétaire décide de vendre le bien (avant 10 ans, à compter de la date de réception), le nouveau propriétaire sera en droit de lui exiger l’assurance décennale en cours. Autrement dit, un client peut rencontrer d’énormes difficultés à vendre sa maison, même en l’absence de tout dommage. Il est alors fortement recommandé de toujours confier ses chantiers à des artisans compétents disposant d’une assurance décennale valide.

À partir de quand l’artisan commence-t-il à profiter de son assurance décennale ?

Pour être valable, une garantie décennale doit obligatoirement être souscrite avant le début de tous travaux, donc avant la date du lancement du chantier sur lequel l’entreprise doit intervenir. À préciser qu’il n’est pas envisageable de souscrire une couverture décennale après démarrage des travaux, que ce soit à la suite ou non d’un défaut professionnel constaté. Dans l’un ou l’autre de ces cas, l’entreprise ne sera pas couverte par cette garantie décennale.

Toutefois, quelques rares compagnies d’assurance acceptent de couvrir les professionnels du bâtiment à la fin des travaux en contrepartie d’une prime majorée. Cependant pour les profils de professionnel à risque, mieux vaut toujours souscrire au contrat décennal en avance. En effet, ce type de profil peut rencontrer de nombreux refus, mais aussi les délais d’étude des dossiers à risque peuvent être relativement plus longs. Afin de gagner du temps et trouver simplement la garantie décennale adaptée à son profil, il est fortement recommandé de se faire accompagner par un courtier spécialisé en assurance décennale. L’expert peut mettre à disposition de l’artisan des conseils personnalisés et son large réseau d’assureurs de renom.

Comment trouver un bon artisan qui a une assurance décennale valide ?

Pour éviter de se retrouver seul dans l’impasse, il est conseillé de solliciter pour ses chantiers des artisans compétents disposant d’une assurance décennale valide. Le bouche-à-oreille reste l’un des meilleurs moyens pour trouver un artisan fiable. Demander à son voisinage ou à ses collègues s’ils connaissent un professionnel aguerri peut véritablement aider. Internet et les annuaires professionnels constituent également d’intéressantes options. Toutefois, il est important de faire attention avec ces deux solutions.

Une fois la perle rare trouvée, il est capital que celle-ci soit couverte par une assurance décennale. Le professionnel doit impérativement remettre au client une copie de son attestation décennale. Il s’agit en effet d’un document délivré aux artisans du bâtiment par une compagnie attestant la souscription d’une assurance de responsabilité civile décennale.

Une attestation, c’est bien, mais il est essentiel qu’elle soit en cours de validité et conforme aux activités du chantier à démarrer. Pour cela, le client doit vérifier minutieusement les mentions suivantes :

  • la date de validité de la couverture,
  • sa valeur,
  • les activités couvertes,
  • la zone géographique couverte…

Faut-il rappeler que l’attestation n’est qu’une simple présomption d’assurance. En effet, elle ne garantit pas au maître d’ouvrage que son constructeur soit réellement assuré. Dans la mesure où il est possible que le contrat du professionnel soit déjà résilié pour défaut de paiement de prime d’assurance échelonnée par exemple. Il est alors recommandé d’aller plus loin dans la procédure de vérification. Contacter l’assureur reste le seul moyen sûr de s’assurer que la garantie du professionnel est toujours en cours de validité.

artisan attestation décennale

Que faire de votre couverture décennale si le constructeur n’existe plus ?

La garantie décennale n’est pas affectée par une liquidation judiciaire ou par une faillite de l’entreprise de construction. À partir du moment où le constructeur était bien couvert par une assurance valide durant toute la période des travaux jusqu’à la livraison du chantier, le maître d’ouvrage n’aura rien à craindre même si l’entreprise venait à disparaître.

En cas de sinistre d’ordre décennal, le client peut suivre la procédure classique : contacter immédiatement son assurance dommages-ouvrage pour qu’elle s’occupe de mener à bien la procédure. En cas d’absence d’une police dommages-ouvrage, il est conseillé d’en contracter rapidement une. La victime doit également prendre les devants des choses en envoyant dans les meilleurs délais un courrier de déclaration de sinistre à l’assurance (ou aux assurances) décennale concernée (s).